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9 questions avec Maud de Manifeste011

J'ai découvert Manifeste 011 sur Instagram (comme souvent lorsque je suis à la recherche de nouvelles personnes inspirantes ou de concepts innovants). J'ai tout de suite adoré le concept. Car, il faut se l'avouer, on manque de boutiques de vêtements véganes ET éco-responsable à Paris. Manifeste 011 est d'ailleurs la seule de la capitale !


Le week-end-même j'allais y faire un tour avec mon amie Maud et j'y rencontrais Maud (quelle coïncidence), la co-fondatrice de la boutique Manifeste 011. Celle-ci s'est de suite montrée disponible pour nous parler des différentes marques disponibles dans le magasin et était hyper calée sur les matières, designers et modèles sélectionnés.

Gros coup de coeur !


C'est donc sans hésitation que je lui ai proposé d'en discuter plus en détail pour cette interview.

crédit photo Guillaume Blot


Quel est le concept de Manifeste011 et depuis combien de temps la boutique existe-t-elle ?

Ma sœur jumelle Judith et moi sommes sensibles aux problématiques environnementales depuis longtemps et voulions faire un projet ensemble qui ait du sens. Le secteur de la mode nous intéressait, notamment parce qu’il est l’un des plus polluants et qu’il était difficile à ce moment-là de trouver facilement des initiatives créatives intéressantes. Le documentaire The True Cost (*documentaire de Andrew Morgan sur l'industrie de la mode sorti juste après la catastrophe du Rana Plaza) a été pour nous un vrai détonateur et nous a poussé à agir. Lorsque nous sommes devenues vegan, nous nous sommes naturellement intéressées à la mode vegan qui commençait tout juste à se développer, et nous avons eu l'idée de créer Manifeste011, qui propose des alternatives belles et à la fois responsables et vegan.


A l'époque la France était assez en retard à sur ces sujets. Il n'y avait pas de boutiques, nous achetions donc beaucoup sur internet. Mais cela a ses limites, surtout lorsqu'il s'agit de nouvelles matières qu'on a envie de toucher comme les simili cuirs ou les matières biosourcées comme le simili cuir d'ananas par exemple.

A l'heure actuelle nous sommes toujours l’unique boutique dédiée à la mode responsable et vegan dans la ville.

Pour nous il est d’ailleurs important d'associer le mot vegan à responsable. Car dans le vegan il existe aussi des matières à base de PVC avec des empreintes carbones énormes et des conditions de travail déplorables. Manifeste011 propose l’inverse de cela.

Que faisais-tu dans la vie avant de te lancer ? Quel a été ton parcours ?


A l'époque je travaillais dans la musique. J'étais attachée de presse indépendante et manager d’artistes, j’ai fait cela plus de 10 ans. Je continue d’ailleurs encore ces activités qui ont un lien avec Manifeste011 puisque la boutique met en place des collaborations avec des artistes, comme récemment avec le label de Rebeka Warrior, Warriorecords.

Ma sœur Judith, elle, a exercé des missions de responsable commerciale au sein de grandes entreprises. Elle a fait un burn-out. Tu sais, quand tu passes la trentaine tu te poses nécessairement un certain nombre de questions, notamment sur le sens que tu veux donner à ta vie. Aujourd’hui nous voyons Manifeste011 comme un projet qui dépasse le secteur de la mode pour aller vers des projets culturels, engagés, liés aussi à notre manière de vivre en général. La boutique est pour nous comme un laboratoire qui nous permet d’expérimenter de nouveaux modes de fonctionnement mais aussi comme une occasion formidable de prendre la parole, de défendre nos valeurs, de faire évoluer le monde là où il nous semble plus beau.


As-tu eu une prise de conscience qui t’a poussée à te lancer dans la mode végane ?


Notre mère nous a toujours élevées dans le respect de la planète et de la terre. Notre engagement écologique vient de là. Le véganisme c'était pour des raisons économiques au départ : les élevages intensifs, le fait de consommer toujours plus de viande, d'abattre des forêts pour nourrir toujours plus d'animaux qui ne verront jamais le jour, et bien d'autres. Il y avait une déconnexion à la nature qui nous a choquée, puis le bien-être animal aussi évidemment, les deux sont liés.


Comment choisissez-vous les pièces ?

Judith et moi faisons beaucoup de veilles, sur instagram notamment. Nous surveillons non seulement toutes les innovations qui voient le jour (c’est fascinant à quel point cela va vite !) en terme de matières, de modes de fabrications, mais aussi tous les nouveaux projets, avec des critères environnementaux de plus en plus strictes. Si les styles nous plaisent, nous étudions plus en détail l’ensemble de la chaine de production et nous prenons contact avec la marque. Nous privilégions les marques françaises puis européennes, qui produisent le plus près possible de nous. Nous avons appris que la marque parfaite n’existe pas, alors pour nous c’est essentiel de donner un maximum d’information, d’être transparentes.


Peux-tu nous parler du manifeste, en particulier de "Eco-sexe" ?

Nous avons imaginé 7 engagements, 7 mots composés, qui font références à nos engagements, à nos valeurs de manière poétique et spirituelle. Eco-sexe c’est un clin d’œil à l’éco-féminisme, un mouvement de pensée dont nous nous sentons proches. C’est sentir son corps comme faisant partie de la terre, de la nature. C’est se sentir libre d’exister comme on est, au-delà des standards que la société capitaliste et patriarcale nous impose.



Que penses-tu de la mode dans le système actuel ? Comment la changer : par une révolution ou petit à petit ?


Je pense que la mode évolue vite, très vite. C’est incroyable à quel point les choses bougent, ce secteur a une grande capacité à se remettre en question à expérimenter, à évoluer, à s’adapter. C’est très encourageant. Je crois que cette évolution est concomitante aux demandes de plus en plus prégnantes des gens à être informés, à vouloir consommer différemment. Les jeunes générations, et leur radicalisme, sont parfois bluffantes. Toutefois, même si toutes initiatives sont visibles et bien présentes, le secteur de l’habillement est encore dominé par de grands groupes industriels qui peinent à changer leurs habitudes en profondeur et qui freinent les actions mises en place (celles-ci finissent très souvent par n’être que des opérations de green washing). En réalité il faudrait produire moins ET mieux. C’est le produire moins qui est le plus long à faire changer selon moi.

Pourquoi un magasin et pas une marque ?

Judith et moi voulions mettre en lumière les designers qui œuvraient déjà en faveur d’un monde meilleur. Créer une énième marque de vêtements ne nous intéressait pas plus que ça pour les raisons que je viens de citer. Nous prenons beaucoup de plaisir à imaginer des collections capsules, notamment des accessoires (comme la casquette Manifeste011), lorsque nous ne trouvons pas sur le marché des pièces ayant des critères d’eco-responsabilité irréprochables et qui nous ressemblent, mais ce n’est pas notre métier. Co-créer, nous associer à des designers dont nous aimons la démarche, imaginer avec eux des pièces nous intéresse davantage.

Et surtout, le lieu physique était essentiel pour nous. Nous aimons rencontrer les gens, échanger, discuter, débattre. Nous apprécions que nos clients passent du temps avec nous et se sentent comme chez eux le temps de leur visite. Les rencontres humaines sont importantes pour nous.

Penses-tu qu’il soit possible de qualifier d’« éthique » une marque de mode qui utiliserait de la laine, du cuir, de la soie … (non-végane quoi) ?

Evidement un de nos critères est le veganisme donc c’est difficile de te répondre par l’affirmative. Mais ta question est intéressante car faudrait-il privilégier un pull en matière synthétique à un pull en laine recyclée par ex ? Faudrait-il privilégier un sac en cuir upcyclé ou un sac en PVC ? Il y a débat. C’est pour ces raisons que nous associons le terme « responsable » au terme « vegan » car « vegan » ne veut pas nécessairement dire « eco responsable »



Pour terminer, quelle autre marque ou créateur/trice de mode éthique adores-tu ?

Nous sommes fans de Fade Out Label une marque d’upcycling qui vient de Berlin. Andrea, le créateur de la marque, conçoit toutes ses pièces à la main dans son atelier à Berlin. Sa mode est non genrée, et toutes ses pièces sont uniques. Nous sommes aussi fan de Viròn, une nouvelle marque de chaussures dont Mats Rombaut (Rombaut) est co-designer. Leurs chaussures sont réalisées à base de déchets de maïs ou de pomme, de matériaux recyclés … et leur style s’inspire du punk et de la rave, deux mouvements qui nous ont profondément marquées.

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