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Comment le lobby de la viande détourne le terme flexitarien



"Thomas sait cuisiner les légumes, mais comme Thomas est flexitarien, il aime aussi manger de la bonne viande"
"Allons-voir l'élevage porcin Lidl de cet éleveur de père en fils" 
"Visitons le salon de l'agriculture et caressons les petits veaux trop mignons dont la mère est en train de griller sur le stand flexitarien voisin"

Le terme flexitarien est à la mode et arrange bien l'industrie de la viande. 


Oui, car flexitarien, c'est flou comme notion. Et c'est donc bien pratique.


A la base, un flexitarien c'était un végétarien qui acceptait de manger des animaux lorsqu'il n'avait pas le choix (repas de famille, restaurant ou autre).

Aujourd'hui, cette définition a changé.

Être flexitarien implique avant tout réduire sa consommation de viande.

La raison principale est souvent pour l'environnement mais peuvent aussi entrer en jeu les problématiques santé et éthique animale.

Flexitarien c'est consommer de la viande plus rarement et préférer une viande dite "responsable". 

Flexitarien c'est alterner entre protéines végétales et animales pour faire des choix plus durables écologiquement parlant. 

Oui car l'élevage a un impact néfaste sur la planète.

Pour maintenir le réchauffement climatique sous les 2°, nous, les Occidentaux, devrions diminuer notre consommation de viande rouge de 90%. Cela permettrait de réduire de 56% l'émission de gaz à effets de serre.

Rien que ça.

Alors oui, on est face à un enjeu capital.


Pourtant, aujourd'hui, ce terme est utilisé à toutes les sauces.

Et le problème est bien là : on peut le tordre et en faire ce que l'on veut. 


J'ai vu dans des restaurants un menu "flexitarien" avec une double dose de protéines : végétales et animales. Combo gagnant et belle entourloupe marketing.

La pub "Aimez la viande" de Thomas le flexitarien ou les stands "être flexitarien c'est ne se passer de rien" au Salon de l'Agriculture montrent bien cette volonté de perdre le consommateur et tourner le terme "flexitarien" à l'avantage du lobby viandard. 


Antinomie vous l'aurez compris, car les flexitariens prônent, OK une "viande de qualité" mais aussi et surtout, moins de viande. 

La définition peu claire, et surtout peu engagée, de ce terme pose selon moi problème.


Si la mode est aujourd'hui au flexitarisme,  les chiffres ne suivent pas : la consommation de viande bovine en France a augmenté de 2,2% sur 2018 et ce au profit de l'élevage "industriel".

Etrange au vu de la tendance? Pas vraiment.

La définition floue perd les consommateurs et la propagande des lobbies n'y arrange rien.


Tout le monde peut se dire flexitarien. 

On retrouvera celui qui ne mange de viande qu'au MacDo de façon hebdomadaire et celui qui mange du steak "premium" tous les deux jours (et la personne en chemin vers le végétarisme ou veganisme). 

Tous ces cas ont des répercussions très différentes sur l'environnement.


Pour le flexitarien consommant une viande dite "responsable" sans ralentir sa consommation, l'impact écologique sera tout de même désastreux sur le long terme puisque cette consommation soutient massivement l'élevage bovin. - et je parle pas de l'impact sur son porte-monnaie -

Pas grave si c'est pour un élevage responsable me direz-vous ? 

Eh bien si.

Au-delà de l'aspect éthique animal, il suffit de prendre l'exemple de l'industrie du bio aujourd'hui. La demande en viande bio a explosé ces dernières années et surtout ces derniers mois. Le résultat : une industrialisation du bio se met en place, la législation évolue et le bio devient de moins en moins écologique.


Il faut plus de fruits et légumes bios ? Chauffons artificiellement les serres quitte à réchauffer l'atmosphère en même temps.  Mettre de la paille au sol pour les cochons coûte trop cher? Laissons les caillebotis à nu même si ils ne filtrent pas les excréments et augmentent donc la pollution des sols et des océans en formant du lisier.  Besoin de plus d'oeufs bios? Serrons plus les poules dans les bâtiments même si c'est moins éthique et durable. 

Le principe est le même pour le flexitarien consommant beaucoup de viande "responsable".


Dans la logique de profit et d'optimisation de l'espace, une forte demande en volume débouchera sur une industrialisation des process et aura des conséquences néfastes sur l'environnement. 


Et il y a le flexitarien, qui représente, je pense, une bonne partie de la population.

Il mange moins, voire plus de viande chez lui, mais, il oublie tous ses principes lorsqu'il sort. 

Compréhensible car il est très facile de ne plus faire le lien écologique ou éthique lorsque l'on a moins de visibilité sur l'aliment brut ou les informations de l'emballage. Mais les conséquences environnementales d'un MacDo hebdomadaire sont désastreuses. 

Les hamburgers des fast food sont produits à partir d'animaux élevés dans les pires conditions possibles et dont l'élevage dit "industriel" pollue plus la planète que tous les transports réunis (à hauteur de 14,5% à 18% selon les études).

Dans ce cas, flexitarien en mangeant moins de viande dans la semaine ? OUI. Bénéfique pour l'environnement, la santé et les animaux en faisant les bons choix ? PAS VRAIMENT.


Alors manger moins de viande oui, mais il y a aussi manger "mieux" qui importe non ?

Pour l'instant ce n'est pas vraiment le cas.  Car, si au global, les Français ont acheté 3,6% moins de viande de boeuf en supermarché, ils ont multiplié par 14 leur consommation de hamburgers... Pas très utile d'en acheter moins tout en sapant ses efforts avec les steaks de fast food qui ne sont, eux, certainement pas "responsables". 


Pour consommer de façon plus durable, il est donc nécessaire de repenser le "volume" consommé et la "qualité" des entreprises et fournisseurs que l'on soutient en payant pour leurs produits.

On a tendance à se dire qu'en réduisant cela suffira et qu'on peut se faire plaisir avec un burger de fast-food plus souvent mais cela anéantit tous les efforts de la semaine.

Le "consommer moins" a lui seul n'est pas optimal, le "consommer mieux" est tout aussi important dans une démarche écologique. 

Les deux paramètres doivent être pris en compte et mis en relation. 

Ceci est, selon moi, le vrai enjeu et la vraie définition du "flexitarisme" qui est avant tout un mode de vie visant à être plus durable et écologique.


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